jeudi 6 août 2020

4 Août

Les mots me manquaient. Les phrases me manquaient pour parvenir à décrire cette immense tristesse qui me serre le ventre et me rougit les yeux. Je ne parvenais pas à canaliser ce flot de pensées.

Sidéré. Incrédule. Éloigné. Impuissant. Affolé. Triste. Apeuré. Si amer.
Je pensais que les mots me manquaient. En réalité, je dois malheureusement admettre presque honteusement que je ressens aujourd’hui beaucoup de haine.
Mon mépris d’hier est devenu de la haine, et je m’en excuse presque. Une haine insoupçonnée.
Une soif de vengeance envers tous ceux qui ont tué, martyrisé, occupé, bombardé, pillé, pris en otage ou asservi le Liban et le peuple libanais ces 40 dernières années. Envers tous ceux qui se sont joués de nous, qu’ils soient libanais ou non, qui nous ont manipulé pour anéantir nos rêves, ceux de ma famille, des miens et des gens qui aspirent simplement à vivre dignement et paisiblement.
J’ai une rageuse haine envers tous ceux qui ont contribué à ensevelir il y a quelques jours nos derniers souvenirs sous les ruines fumantes de Beyrouth.
Qu’ils soient libanais ou non, ils rendront des comptes à ceux restés au pays, à ceux qui ne sont pas encore partis ou qui ont deja émigré le cœur déchiré, à ceux qui ont caressé l’espoir d’un retour pendant des années et des générations mais qui ne le feront jamais.
Cette explosion, au delà de la recherche des responsables qui payeront, est à l’image de nos frustrations ensevelies, de nos souffrances maquillées par de la résilience et de nos gigantesques désillusions.
J’ai de la haine. Une haine insurmontable. Un désir de vengeance car la justice ne me suffit plus. Et c’est cela aussi qui me rend profondément triste et m’effraye.
Pour m’en débarrasser, il est temps à présent de se débarrasser d’eux. Sans perdre la raison.